
Le référentiel de compétences est aujourd’hui un pilier incontournable de tout dispositif de formation : il structure les apprentissages, aligne les pratiques pédagogiques et garantit la qualité de l’évaluation.
1. Le rôle central du référentiel dans votre dispositif pédagogique
1.1 Qu’est-ce qu’un référentiel de compétences ?
Exemple concret : Dans une formation de développeurs web, le référentiel pourrait inclure la compétence « Développer une application web responsive ». Les critères d’évaluation associés pourraient être : « L’application s’affiche correctement sur différents formats d’écran », « Le code HTML respecte les normes d’accessibilité W3C », « Les temps de chargement sont optimisés », etc.
1.2 Enjeux stratégiques et pédagogiques du référentiel
Exemple concret : Dans un institut de formation en management, des formateurs de différents modules (communication, finance, stratégie) participent tous au développement de la compétence « Élaborer un business plan ». Grâce au référentiel, chacun sait précisément quelle facette de cette compétence il doit aborder et comment elle sera évaluée, assurant ainsi une progression cohérente pour l’apprenant.
Exemple concret : Dans une école d’ingénieurs, la compétence « Concevoir un système automatisé » se construit progressivement à travers plusieurs modules techniques (programmation, électronique, mécanique). Le référentiel permet de répartir clairement les sous-compétences entre ces différents modules et d’assurer une progression cohérente, sans rupture ni redondance.
Exemple concret : Dans une formation de conseillers en insertion professionnelle, les apprenants reçoivent dès le début du cursus une cartographie des compétences à acquérir. Chaque module précise clairement quelles compétences seront travaillées et selon quels critères elles seront évaluées. Les apprenants peuvent ainsi visualiser leur progression, identifier leurs points forts et axes d’amélioration, et s’impliquer activement dans leur formation.
Objectiver l’évaluation
Des critères clairement définis réduisent la part de subjectivité dans l’évaluation. Les apprenants sont jugés sur la base d’indicateurs précis et observables, ce qui est à la fois plus équitable et plus transparent.
Exemple concret : Dans une école de commerce, plutôt que d’évaluer vaguement la « qualité de présentation orale », le référentiel détaille des critères spécifiques : « Structure logique du discours », « Contact visuel avec l’auditoire », « Réponses pertinentes aux questions », etc. Chaque critère est évalué selon une échelle précise, réduisant ainsi les biais personnels des évaluateurs.
Se conformer aux exigences de France Compétences et du RNCP
La création ou la révision d’un Titre Professionnel ou d’une Certification nécessite désormais de définir précisément les compétences et de les structurer de manière claire. France Compétences exerce un contrôle de plus en plus strict sur la qualité et la cohérence des référentiels, ce qui oblige les établissements à être rigoureux, tant dans la rédaction que dans la mise en œuvre.
Exemple concret : Un organisme de formation souhaitant faire enregistrer une certification au RNCP a vu son dossier rejeté en première instance pour « manque de précision dans la formulation des compétences et insuffisance des critères d’évaluation ». Après un travail approfondi sur son référentiel, incluant une reformulation des compétences en verbes d’action mesurables et l’élaboration de critères précis, le dossier a été accepté lors de la deuxième soumission.
Au-delà de ces enjeux pédagogiques, se cachent également des considérations stratégiques majeures :
- La crédibilité de l’institution : un référentiel de qualité témoigne du sérieux et de la rigueur de l’établissement.
- L’attractivité auprès des futurs apprenants : la clarté des objectifs et des évaluations rassure les candidats sur la valeur de la formation.
- Les relations avec le monde professionnel : un référentiel en phase avec les besoins du marché renforce la pertinence de la formation aux yeux des employeurs.
- La capacité à innover : un référentiel bien structuré facilite l’adaptation de l’offre de formation à des besoins en évolution rapide.
1.3 La problématique centrale : un référentiel souvent confus et peu opérationnel
Malgré l’importance cruciale d’un référentiel solide, de nombreux établissements ou équipes pédagogiques peinent à en construire un qui soit réellement opérationnel, c’est-à-dire applicable sur le terrain sans ambiguïté et sans lourdeur excessive.
Plusieurs questions épineuses surgissent alors, révélant la complexité de cette démarche :
- Comment éviter de se perdre dans des formulations trop théoriques ou trop abstraites ?
- Comment déterminer le niveau de détail nécessaire pour être à la fois précis et agile ?
- Comment faire en sorte que les critères d’évaluation soient suffisamment robustes pour refléter la réalité du terrain ?
- Comment s’assurer que l’ensemble du dispositif évolue au même rythme que les compétences demandées sur le marché du travail ?
- Comment respecter le cadre du Répertoire National des Certifications Professionnelles (RNCP) et garantir que chaque compétence, ainsi que ses modalités d’évaluation, soient conformes aux standards attendus ?
Exemple concret : Un CFA du secteur industriel avait élaboré un référentiel comportant des compétences formulées de manière générique : « Savoir contrôler la qualité », « Maîtriser les équipements », etc. Dans la pratique, chaque formateur interprétait ces compétences à sa façon, conduisant à des évaluations très hétérogènes. Les apprentis se plaignaient du manque de clarté des attendus, tandis que les entreprises d’accueil constataient des écarts importants dans les compétences réellement acquises. Cette situation a nécessité une refonte complète du référentiel.
L’un des principaux obstacles à l’élaboration d’un référentiel véritablement opérationnel réside dans la confusion conceptuelle qui règne souvent autour des notions clés : compétence, connaissance, savoir-faire, etc. Cette confusion terminologique, bien que semblant relever du simple débat sémantique, a en réalité des conséquences très concrètes sur l’efficacité de la formation et la pertinence de l’évaluation.
2. Clarifier les concepts et terminologies : une étape fondamentale
2.1 La confusion terminologique : premier obstacle à surmonter
L’expérience nous montre que la plupart des difficultés rencontrées dans l’élaboration ou l’utilisation d’un référentiel commencent par une confusion conceptuelle. Les termes « compétence », « connaissance », « capacité », « aptitude », « savoir-faire », « savoir-être » sont souvent utilisés de manière interchangeable, alors qu’ils recouvrent des réalités bien distinctes.
- Des référentiels hétérogènes où l’on mélange différents niveaux (des connaissances théoriques côtoient des compétences complexes)
- Des difficultés à évaluer, car on ne sait pas précisément ce qui doit être observé
- Des incompréhensions entre formateurs sur ce qui doit être enseigné et évalué
- Des confusions pour les apprenants qui ne perçoivent pas clairement ce qui est attendu d’eux
Exemple concret : Dans une école de commerce, le référentiel mentionnait pêle-mêle « Connaître les principes du marketing digital » (connaissance théorique), « Savoir utiliser Google Analytics » (savoir-faire technique) et « Élaborer une stratégie de communication digitale » (compétence complexe). Cette absence de distinction menait à des évaluations incohérentes : certains modules se contentaient de vérifier les connaissances par QCM, quand d’autres exigeaient des projets complets démontrant la capacité à mobiliser ces connaissances en situation.
2.2 Définir clairement les concepts clés
Exemple : « Concevoir et mettre en œuvre un plan de communication digitale adapté à une TPE » est une compétence car elle mobilise diverses ressources (connaissances en marketing, maîtrise des outils digitaux, capacité d’analyse, etc.) dans une situation complexe et contextuelle.
Exemple : « Connaître les différents leviers du marketing digital » est une connaissance. L’apprenant peut parfaitement citer ces leviers sans pour autant être capable de les utiliser de manière pertinente dans un contexte professionnel.
Exemple : « Paramétrer une campagne publicitaire sur Facebook Ads » est un savoir-faire. L’apprenant sait réaliser cette opération technique mais cela ne garantit pas qu’il saura l’intégrer judicieusement dans une stratégie globale.
Exemple : « Faire preuve d’écoute active lors d’un entretien client » est un savoir-être. Il s’agit d’une disposition comportementale qui influence la qualité de l’interaction professionnelle.
Exemple : Pour la compétence « Concevoir un plan de communication digitale », des critères pourraient être : « Le plan identifie clairement la cible visée », « Les canaux sélectionnés sont cohérents avec les objectifs », « Le budget est réaliste et détaillé », etc.
2.3 Méthodes pratiques pour établir un langage commun
Exemple concret : Un institut de formation aux métiers de la santé a consacré une journée pédagogique à l’élaboration d’un glossaire partagé. Chaque concept (compétence, savoir, critère, etc.) a été défini et illustré par des exemples issus du secteur. Ce document est désormais remis à chaque nouveau formateur et sert de base lors des réunions de conception pédagogique.
Exemple concret : Une école d’ingénieurs a structuré ses compétences selon les six niveaux de la taxonomie révisée de Bloom : se souvenir, comprendre, appliquer, analyser, évaluer, créer. Chaque compétence est ainsi clairement positionnée à un niveau cognitif précis, facilitant la progression pédagogique et l’évaluation.
Exemple concret : Un CFA du secteur du bâtiment a mis en place des ateliers mensuels où les formateurs travaillent collectivement sur l’opérationnalisation du référentiel. Chaque atelier aborde un bloc de compétences spécifique et permet aux formateurs de s’approprier les concepts tout en élaborant des situations d’apprentissage et d’évaluation cohérentes.
Travailler sur des exemples concrets
Transformer des formulations vagues en éléments précis et mesurables à travers des exercices pratiques et des études de cas.
Exemple : Prenons la compétence floue « Être capable de communiquer efficacement ».Reformulation plus précise :
- Compétence : « Communiquer à l’oral dans un contexte professionnel »
- Indicateurs/critères : « Structurer un discours avec introduction, développement et conclusion », « Adapter son vocabulaire à l’audience », « Utiliser des supports visuels pertinents »
- Savoir-faire associés : « Maîtriser les techniques de prise de parole » (voix, gestes, supports)
- Savoir-être associés : « Gérer son stress en situation d’exposition », « Faire preuve d’écoute lors des questions »
2.4 Les bénéfices d’une terminologie partagée
L’investissement dans cette clarification conceptuelle génère des bénéfices considérables pour l’ensemble du dispositif de formation :
Pour les équipes pédagogiques
- Une communication plus fluide et précise lors des réunions pédagogiques
- Une meilleure coordination entre les différents modules ou unités d’enseignement
- Une plus grande facilité à concevoir des évaluations pertinentes
- Une harmonisation des pratiques d’enseignement et d’évaluation
Témoignage : « Avant, lors de nos réunions pédagogiques, nous passions un temps considérable à nous mettre d’accord sur ce que nous entendions par ‘compétence’ ou ‘savoir-faire’. Désormais, avec notre glossaire commun, nous pouvons nous concentrer sur le fond plutôt que sur la forme. » – Responsable pédagogique, École de management
Pour les apprenants
- Une meilleure compréhension des attentes et des objectifs de la formation
- Une plus grande transparence dans les critères d’évaluation
- Un sentiment accru de progression et de maîtrise
- Une capacité renforcée à s’auto-évaluer et à identifier ses points d’amélioration
Témoignage : « En tant qu’étudiant, ce qui a changé ma perception, c’est de passer d’objectifs vagues comme ‘comprendre le marketing digital’ à des compétences précises comme ‘être capable d’analyser l’efficacité d’une campagne SEA’. Je sais exactement ce qu’on attend de moi et comment je serai évalué. » – Étudiant en Master Marketing Digital
Pour l’institution
- Un référentiel plus solide et défendable face aux instances de certification
- Une meilleure articulation entre formation et besoins du marché
- Une communication externe plus claire sur les compétences développées
- Une amélioration continue facilitée par des critères précis et mesurables
Témoignage : « La refonte de notre référentiel avec une terminologie précise a été déterminante lors du renouvellement de notre certification RNCP. Les évaluateurs ont souligné la clarté de notre approche et la cohérence entre compétences visées et modalités d’évaluation. » – Directrice, Organisme de formation professionnelle
Conclusion : Poser des bases solides pour un référentiel opérationnel
Pour aller plus loin
- Un glossaire téléchargeable des principaux termes de l’ingénierie pédagogique par compétences
- Un modèle de fiche de clarification conceptuelle pour structurer vos travaux d’équipe
- Notre expertise en formation interne pour accompagner vos équipes pédagogiques